Les valorisations sont attractives après un début d’année en demi-teinte avec des perspectives de croissance à long terme qui restent solides.
Par Frédéric LEJOINT
Les fonds exposés sur le secteur de l’eau restent toutefois des stratégies attractives pour les investisseurs de long terme. Elles ont dégagé des performances annualisées supérieure à 8% durant la dernière décennie, un niveau de performance confirmé sur des périodes plus courtes (5 ans et 3 ans), signe que ces fonds ont généralement des comportements assez stables dans le temps, et constituent une manière de se protéger contre la volatilité des marchés boursiers.
Leaders
Dans ce domaine, Pictet Water est une des stratégies les plus anciennes et les plus populaires, avec des actifs sous gestion supérieurs à 7 milliards d’euros et une performance annualisée sur dix ans qui dépasse 8%. Cédric Lecamp supervise cette stratégie depuis septembre 2018. « Notre stratégie existe en fait depuis 2000, et est un des plus anciens fonds thématiques proposés par Pictet Asset Management. Notre approche est basée sur des mégatendances, avec un positionnement de type buy&hold et une vision de long terme », certaines lignes étant détenues depuis le lancement du fonds.
Parmi ces tendances de fond, il cite le fait que 2,2 milliards de personnes n’ont pas un accès régulier à l’eau potable, ou le fait que 2/3 de l’eau de surface est aujourd’hui contaminée par les micropolluants. Le portefeuille est très largement exposé sur l’Amérique du Nord (plus de 80% des encours sous gestion), avec une prédilection pour les petites et moyennes capitalisations et le secteur industriel. La stratégie est investie sur une quarantaine de positions, les dix premières pesant plus de 40% des actifs sous gestion, avec des sociétés telles que Thermo Fisher, Pentair, Xylem , Ecolab , Republic Services ou Veralto parmi les fortes convictions.
Fondamentaux
Chez Allianz Global Investors, le fonds Allianz Global Water propose une exposition tout aussi concentrée sur le marché américain et le secteur industriel, avec une performance annualisée supérieure à 6% depuis le lancement du fonds en 2018, et des actifs sous gestion qui dépassent désormais les 800 millions d’euros. Le portefeuille d’une quarantaine de valeurs est géré depuis sa création par Andreas Fruschki, qui supervise également l’ensemble de l’offre thématique chez le gestionnaire allemand.
« L’eau est une ressource nécessaire à la vie sur terre, et est souvent ignorée par les investisseurs alors que c’est une évidence. La filtration et le traitement des eaux usées sont nécessaires pour faire face aux besoins des migrations de population, dans un contexte où les infrastructures (sur le marché américain) ont été construites il y a plus d’un demi-siècle et nécessitent une modernisation urgente. La mise en place d’un encadrement légal sur les PFAS sera également de nature à soutenir les investissements dans le traitement des eaux usées ».
Thème maritime
Enfin, CPR Asset Management ( Amundi ) propose depuis 2022 une exposition originale sur le secteur de l’eau, la stratégie de CPR Invest Blue Economy étant davantage portée sur l’eau de mer et l’économie de la mer, notamment sur la préservation de l’écosystème marin au travers de la gestion des déchets ou le traitement des eaux usées sur terre. Le fonds a dégagé une progression proche de 10% durant les trois dernières années.
D’un point de vue sectoriel et géographique, l’exposition est plus diversifiée, avec notamment des poids plus importants sur l’Europe, le Japon, les valeurs de la consommation ou des ressources naturelles. Le produit « maritime » a d’ailleurs mieux résisté que des deux fonds « eau » depuis le début de l’année, l’exposition sur l’Europe ayant clairement joué en faveur de cette stratégie.
Impact Trump
« Les sociétés américaines ont été impactées par les politiques mises en place par la nouvelle administration », souligne Cédric Lecamp (Pictet AM). « Les droits de douane ont engendré une certaine volatilité chez certains de nos acteurs du secteur des technologies de l'eau, car leurs chaînes d'approvisionnement sont très mondialisées. Ce phénomène est plutôt transitoire et ne touche qu'un faible pourcentage de nos lignes ».
Pour Andreas Fruschki ( Allianz GI), le marché ne semble pas encore avoir intégré le potentiel de croissance à venir, avec des multiples de valorisation conformes aux moyennes historiques alors re diverses sources de croissance supplémentaire vont réapparaît durant les deux à trois prochaines années. « L’eau constitue une opportunité d’investissement extrêmement attractive pour les prochaines années dans un univers composé d'entreprises de haute qualité dotées de moteurs à long terme, de fondamentaux solides et de modèles économiques résilients permettant des versements de dividendes attractifs ».
Opportunités
Parmi les principales sources d’opportunités pour sa stratégie, Cédric Lecamp pointe de son côté le secteur spécialisé dans le traitement des déchets et le recyclage des eaux usées. Il souligne qu’un des défis importants concerne la réutilisation de l’eau, notamment à l’aide de technologie de désalinisation dont le coût en énergie a diminué de 95% depuis les années 60. « D’ici 2040, nous estimons que 50% de l’eau potable proviendra de la réutilisation des eaux usées (contre 12% à l’heure actuelle). Nous avons fortement augmenté nos investissements sur ce segment du marché durant les dernières années ».
« Les performances de notre secteur ont été très solides durant ce dernier quart de siècle, et nous pensons qu’il conserve des perspectives solides pour les 25 prochaines années. Les problèmes liés à l'eau sont encore plus nombreux que lors de la création du fonds. Par exemple, le changement climatique se manifeste surtout au niveau de l'eau, avec un nombre de sécheresses et d'inondations qui a été multiplié par six au cours des 20 dernières années et nous allons avoir besoin de beaucoup plus de systèmes de drainage des eaux pluviales pour nous y préparer ».