Par Frédéric Lejoint.
Après deux années boursières compliquées, les valeurs immobilières pourraient revenir sur le devant de la scène grâce à la détente des taux.
Contactée par nos soins, Pascale Nachtergaele explique la stratégie Nagelmackers – Eurozone Real Estate, qu’elle pilote depuis 2017 et qui affiche quatre étoiles chez Morningstar. Comme tous les fonds actifs sur le segment de l’immobilier européen, sa performance a été fortement mise sous pression en raison de la forte hausse des taux obligataires européens depuis 2022. « L’année dernière a une nouvelle fois été une année difficile pour l’immobilier européen », concède-t-elle.

Après un bon départ, le secteur a de nouveau été mis sous pression vers la fin 2024 en raison de taux qui n’ont pas reflué aussi rapidement que prévu, en dépit d’une première baisse du taux directeur de la BCE annoncée à la fin du deuxième trimestre. « Les conséquences de la réélection de Donald Trump ont contribué à remettre de la pression sur le secteur », et en particulier sur le secteur de la logistique.
Impact logistique
Nagelmackers – Eurozone Real Estate a un important biais géographique sur le marché belge, qui représente entre 25 et 30% des actifs sous gestion, avec des noms tels que Aedifica , Xior ou Montea parmi les 10 principales positions. « Alors que des segments comme l’immobilier commercial ou résidentiel se sont bien comportés en 2024, la logistique et les soins de santé ont été mis sous pression. »
« Durant l'été, de nombreux commentaires ont commencé à faire état d’un affaiblissement de la demande dans le segment de la logistique, ce qui fut ensuite confirmé par les commentaires de certains dirigeants. La direction de WDP a ainsi signalé qu’à l’échéance d’un contrat, il n’y avait plus systématiquement plusieurs locataires intéressés, comme c’était le cas après la pandémie. »
Même si le taux d’occupation chez WDP est resté élevé durant les derniers trimestres, Pascale Nachtergaele souligne que ces commentaires indiquent que le marché est plus difficile qu’avant, et qu’il faut s’attendre à une normalisation de la croissance des revenus locatifs. « Je pense toutefois que cette faiblesse sera de courte durée, et que les cours dans ce segment intègrent désormais beaucoup de mauvaises nouvelles. Même si nous avons un peu réduit nos positions, nous restons toujours surpondérés sur ce thème », et notamment sur un acteur comme Montea qui cherche à doubler la taille de son portefeuille d’ici 2027. Elle souligne qu’il faudra vraisemblablement attendre la publication des résultats annuels pour que le marché se rende compte des fondamentaux solides.
Signaux favorables
Pour 2025, elle souligne que la baisse des taux va constituer un vent favorable au secteur, avec des coûts financiers qui vont refluer. La baisse des taux est également un élément favorable pour la valorisation des portefeuilles, avec des ajustements à la baisse qui devraient désormais être modestes. « Le pire est clairement derrière nous. Et pour certaines sociétés, nous pensons que la valeur des portefeuilles pourrait même déjà s’orienter à la hausse durant les prochains trimestres ».
Un autre élément favorable est la réouverture des marchés des capitaux, avec plusieurs augmentations de capital ou émissions de dette qui ont été annoncées ces derniers mois. « Alors que le discours s’était principalement concentré sur la réduction de l’endettement au début 2024, les commentaires récents des dirigeants semblent plutôt indiquer un regain d’intérêt pour les perspectives de croissance. »
Ces signaux favorables ont commencé à faire leur apparition alors que les valorisations sur le secteur restent à des niveaux très dépréciés, avec un rendement sur dividendes qui dépasse aujourd’hui 4,5%. « Nous arrivons aussi au bout du processus de réduction des dividendes chez les acteurs européens. A l’inverse, nous constatons que de nombreux groupes allemands sont actuellement en train de rétablir leurs versements.
Préférences sectorielles
« Au vu de la croissance qui s’annonce faible pour les prochains trimestres, je préfère aujourd’hui adopter un positionnement défensif au niveau des noms que je détiens en portefeuille », indique Pascale Nachtergaele. « Dans ce domaine, le résidentiel allemand reste attractif au vu du déséquilibre persistant entre l’offre et la demande sur ce marché, avec des groupes qui commencent de nouveau à regarder les opportunités de croissance avec un taux de refinancement qui va s’orienter à la baisse. Il s’agit actuellement de notre plus forte pondération sectorielle avec des noms comme Vonovia , TAG Immobilien ou Leg Immobilien. »
Le segment des soins de santé (notamment les maisons de repos) a été impacté en 2024 par les difficultés rencontrées par certains opérateurs. « Mais ce segment reste naturellement défensif, avec des marges qui sont en train de se redresser chez les opérateurs. Ici aussi, c’est un marché sur lequel il existe un fort déséquilibre entre l’offre et la demande, avec une capacité qui devrait doubler d’ici 2050 afin de pouvoir faire face à la demande. » Aedifica est sa valeur préférée, en raison de sa bonne santé financière, de sa position de leader, et de la volonté de procéder à des acquisitions dans un contexte de consolidation du secteur européen.
Les logements pour étudiants sont un autre segment que Pascale Nachtergaele favorise. « C’est également un segment assez défensif qui est peu affecté par la faiblesse de l'économie. » Elle souligne apprécier Xior , qui dispose d’un nouvel actionnaire de référence, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles opportunités de croissance pour le groupe.
Sous-pondérer
A l’inverse, elle se montre actuellement plus hésitante sur l’immobilier commercial et sur les bureaux. « La bonne tenue de la consommation privée en 2024 a soutenu les acteurs de l’immobilier commercial, mais la faiblesse de l’économie attendue en 2025 risque de jouer en défaveur de ce segment, et nous avons récemment décidé de réduire notre exposition sur des grands noms de ce segment comme Klépierre ou Unibail-Rodamco. »