Par Frédéric Lejoint.
FFG – Global Flexible Sustainable (ISIN : LU1697917083) a dégagé une performance appréciable durant l’exercice 2024, avec une progression de 5,7%. Et la nouvelle année semble également partie sur de bonnes bases, avec un nouveau gain de près de 4% depuis le 1er janvier. Le fonds géré par Guy Wagner (Banque de Luxembourg Investments) et distribué sur le marché belge par Funds For Good a désormais totalement digéré le difficile exercice 2022, marqué par un recul de 12,7% de la valeur du fonds.
Pour rappel, Funds For Good est un distributeur de fonds « philanthropique », qui utilise 10% des commissions de gestion perçues (ou 50% de son résultat net) afin de proposer des prêts sans intérêts à des entrepreneurs qui cherchent à lancer une activité professionnelle, et qui éprouvent des difficultés à rassembler les garanties nécessaires pour se voir octroyer un crédit bancaire. Depuis le lancement de Funds For Good il y a une petite quinzaine d’années, ce sont ainsi près de 1300 entrepreneurs qui ont été aidés, avec des nouveaux projets qui arrivent désormais au rythme d’une dizaine par mois. « Par rapport au moment où nous avons lancé ce projet, la taille de nos financements que nous octroyons est aussi beaucoup plus importante », indique Nicolas Crochet (Co-CEO de Funds For Good).
Grand frère
Nous avons eu récemment l’occasion d’écouter Guy Wagner, qui gère non seulement FFG – Global Flexible Sustainable, mais également son grand frère BL-Global Flexible (ISIN : LU0211340665) chez Banque de Luxembourg Investments, une stratégie qui a reçu de nombreuses récompenses au fil des années et dont les encours dépassent désormais 1,25 milliards d’euros. Les deux fonds adoptent grosso modo les mêmes expositions sectorielles, mais la sélection de valeurs se fera sur base de critères de durabilité plus stricts pour le fonds proposés par Funds For Good, ce qui a permis à ce fonds d’obtenir le label Towards Sustainability de Febelfin.
FFG – Global Flexible Sustainable a été lancé plus récemment dans un contexte moins favorable aux fonds flexibles (en 2018 lorsque les taux obligataires étaient à des niveaux extrêmement bas), avec des encours qui tournent aujourd’hui autour de 200 millions d’euros. « Sur les dernières années, la performance des deux fonds a été relativement similaires », constate encore Nicolas Crochet.
Macroéconomie
La philosophie d’investissement de Guy Wagner se base sur une analyse de la situation macroéconomique, dont va découler un positionnement plus ou moins agressif sur les marchés financiers. « Pendant de nombreuses années, nous avons été dans un environnement de croissance positive avec une inflation faible, un contexte traditionnellement favorable aux actions avec des multiples de valorisation qui ont tendance à grimper ».
Depuis 2022, le retour de l’inflation a toutefois changé la donne, avec des taux qui ont été fortement relevé par les banquiers centraux, et des multiples de valorisation qui se sont ajustés. « A l’instant présent, il est devenu difficile de faire des prévisions en raison de l’imprévisibilité de la nouvelle administration aux Etats-Unis. Le cycle économique, il faut aujourd’hui le mettre un peu entre parenthèses. Il y a aujourd'hui d'autres facteurs structurels qui sont plus importants, à commencer par la démographie, le vieillissement de la population et son impact sur les finances publiques, sur le marché de l'emploi et sur la disparition du chômage dans les économies vieillissantes. Les Etats-Unis sont loin d’être immunisés contre cette évolution ».
Inflation soutenue
Dans le même temps, Guy Wagner constate que l’inflation ne baisse plus depuis le milieu de 2024. « Elle s’est stabilisée sur des niveaux qui restent supérieur à l’objectif officiel des banques centrales de 2%, ce qui n’a pas empêché ces dernières de baisser leurs taux directeurs à de multiples reprises. On peut aujourd’hui affirmer que l’objectif de 2% n’est plus vraiment un plafond pour les autorités monétaires, mais plutôt un plancher ».
Il souligne également qu’à chaque fois qu’un problème de surendettement a été résolu par l'inflation, des taux réels négatifs (inflation supérieure au taux nominal) sont nécessaires. « C’est la principale raison pour laquelle il faut acheter ou privilégier les actifs réels et pas les actifs monétaires et les emprunts d'Etat qui vont continuer à détruire le pouvoir d'achat », avec une offre de dette souveraine qui va continuer à monter.
« Les actions doivent être considérées comme des prises de participation à long terme dans une entreprise, et il faut donc privilégier les sociétés de très grande qualité achetée à des prix raisonnables. En outre, contrairement à l’offre d’emprunts d’état, l’offre d'actions de qualité ne fait que baisser parce que certaines de ces entreprises sont rachetées ou parce qu’elles ont tendance à racheter leurs propres titres. En tant qu’investisseur de longue durée, il faut privilégier la rareté et pas l'abondance ».
Exceptionnalisme
Enfin, Guy Wagner se montre également très critique quant au poids pris par la bourse américaine dans les allocations des investisseurs. « Les investisseurs américains n’achètent plus d’actions en dehors de leur marché national, et de nombreux investisseurs internationaux privilégient également le marché américain à leur marché national. Alors que l'économie américaine ne représente 20% de l'économie mondiale, Wall Street pèse 70% de la capitalisation mondiale. En outre, les 15 plus grandes valeurs américaines pèsent presque autant que toutes les sociétés européennes, japonaises et émergentes réunies. C’est un niveau de concentration qui n’a plus été observé depuis le Japon à la fin des années 80 ».
Il réfute également la thèse de l’exceptionnalisme américain, avec une économie américaine qui serait plus forte et dynamique grâce à son énorme marché domestique, et une domination total de l’économie digital. « Cet argument est utilisé pour justifier le fait que le marché américain doit continuer à monter, alors qu’il est aujourd'hui très cher, avec des perspectives de performance qui sont aujourd’hui beaucoup plus faibles », tandis que tous les autres marchés affichent des décotes historiquement élevées.
« Nous avons un portefeuille qui est fortement orienté vers les actions, mais nous sous-pondérons fortement les Etats-Unis par rapport à leur poids dans l’indice mondial. A l’inverse, le Japon et l'Asie sont surpondérés avec également 18% d'obligations indexées sur l’inflation émises par l’état américain. Au niveau sectoriel, nous restons surpondérés dans les industrielles défensives, tandis que technologie est plutôt représentée par l’Europe ou l’Asie ».