
Christopher Dembik, Senior Investment Strategy Adviser Pictet Asset Management.
Comme prévu, la Fed a abaissé son taux directeur de 25 points de base. Mais rien n’est acquis pour la suite en raison d’une conjoncture économique américaine complexe et de la difficulté à avoir des statistiques en raison du shutdown. Nous pensons que la Fed a tout intérêt à jouer la carte de la prudence. Trois raisons à cela :
- La dernière série de réductions de taux est intervenue alors que les créations d’emplois ralentissaient durant l’été. Ce fléchissement est surtout lié à des contraintes d’offre sur le marché du travail, accentuées par des politiques migratoires plus strictes que la Fed ne peut pas compenser en stimulant la demande. Les données ne montrent donc pas un véritable ralentissement cyclique de l’emploi, mais plutôt un manque d’offre de main-d’œuvre. Cela devrait être confirmé lorsque les statistiques publiques portant sur le marché du travail seront de nouveau communiquées.
- La Fed estime que les droits de douane ont temporairement provoqué une hausse des prix à la consommation, mais que l’inflation devrait retomber sous la barre des 3% l’an prochain, une fois ces effets dissipés. Cependant, cette hypothèse reste fragile. Les États-Unis ne semblent pas revenir vers la période de faible inflation observée avant la Covid. Par ailleurs, l’inflation des services reste environ un point plus élevé que dans les décennies précédentes, même sans compter l’effet des tarifs. Le scénario d’une inflation persistante se dessine, selon nous.
- L’argument principal de la Fed pour justifier les baisses de taux repose sur l’idée que la politique monétaire actuelle est restrictive. Or, les indicateurs financiers ne montrent pas de tension majeure : les actions américaines sont en hausse de 3% depuis la réunion du FOMC de septembre, les écarts de crédit à haut rendement sont historiquement faibles et les conditions monétaires mesurées par la Fed de Chicago se situent à des niveaux comparables à ceux de 2022 - période de forte liquidité.
Par conséquent, patience.
Autre point marquant de la semaine passée, qui est décorrélé de la réunion de la Fed, l’once d’or connaît une mauvaise passe. Pas de panique toutefois. La récente baisse est liée à des facteurs techniques et à la prudence des traders (et non des institutionnels !) qui clôturent leurs positions acheteuses pour prendre leurs bénéfices et en allouent une partie sur les actions. Il est probable que l’once d’or n’atteigne pas de nouveau point haut cette année. En se basant sur l’analyse technique, la tendance est baissière à court terme en direction des 3,846 dollars. Cette phase de consolidation/correction pourrait perdurer jusqu’au début de l’année prochaine. La dernière, commencée en avril, avait duré quatre mois. Cela pourrait profiter à l’argent – on avait constaté à ce moment-là des ventes d’or et des achats d’argent. À long terme, les facteurs haussiers sont toujours en place.
À surveiller
En raison du shutdown, le marché va surveiller de près les chiffres de l’enquête ADP qui sont pourtant unanimement considérés comme peu fiables et faiblement corrélé au rapport mensuel sur l’emploi du Département du Travail. Mais il faut faire avec ce qu’on a sous la main.
Enfin, les résultats trimestriels, jusqu’à présent très bons, continuent avec Marriott (lundi), Gilead Sciences (mercredi), Fortinet (jeudi) et Sony (vendredi).
Vous ne l’avez pas lu dans la presse
Sans faire de bruit, la bourse japonaise affiche l’une des meilleures performances annuelles cette année. Hors effet taux de change, le Nikkei 225 est en progression de 25,8% contre 16,9% pour le S&P 500…et seulement 11,2% pour le CAC 40*. Comment expliquer cette envolée ? Le yen faible transforme les ventes mondiales en revenus domestiques plus importants. Selon nous, la monnaie japonaise a peu de chance de se ressaisir prochainement. Autre facteur, structurel celui-ci, l’amélioration de la gouvernance. Depuis 2023, la bourse de Tokyo impose un reporting public très strict et renforce le rôle des petits actionnaires. Conséquence indirecte de cela, les managements sont incités à faire des rachats d’actions – vraie lame de fond haussière en bourse. En un an, les rachats d’actions ont ainsi doublé entre 2023 et 2024.
*En date du 29 octobre 2025, source Boursorama .


