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Les véhicules électriques, pas des "tueurs de climat" en fin de compte ?
Calendar01 Jun 2021
Thème: ESG
Maison de fonds: MainFirst

Les scientifiques se baseraient depuis des années sur des données erronées.

Par Jan-Christoph Herbst, Portfolio Manager des fonds MainFirst Global Equities Fund, MainFirst Global Equities Unconstrained Fund & MainFirst Absolute Return Multi Asset

La rumeur selon laquelle les véhicules électriques seraient néfastes pour l'environnement et ne constituent qu'un leurre a longtemps circulé. C'est tout simplement faux, car les calculs ont souvent été effectués sur base de chiffres totalement erronés et les résultats d’analyses ultérieures ont été relayés par les médias.

Des slogans tels que "La voiture électrique n'entraîne aucune réduction de CO2. La production des batteries consomme tellement d'énergie que, tout compte fait, l'empreinte carbone est bien plus élevée. De plus, le réseau électrique viendrait à saturer si un grand nombre de personnes rechargeaient au même moment et il faudrait attendre que les sources d'énergie renouvelables produisent davantage d'électricité ainsi que d'autres opinions au sujet des véhicules électriques se sont répandues ces dernières années. Cela est en partie dû au fait qu'en 2019, l'ADAC (l'Association automobile allemande), qui compte plus de 21 millions de membres, a alimenté le sentiment négatif envers cette nouvelle technologie. Mais ces hypothèses sont probablement fausses.

Des erreurs méthodologiques dans le calcul des émissions

Tous ces auteurs se réfèrent à une étude très controversée de 2017, qui rapporte que la production de batteries génère de grandes quantités d'émissions, à savoir entre 150 kg et 200 kg de CO2 par kWh. Cependant, les auteurs de cette étude, commandée par l'Institut Suédois de Recherche Environnementale IVL et connue par la suite sous le nom d'Étude Suédoise, n'ont jamais récolté leurs propres données sur les émissions dues à la production de batteries. Au lieu de cela, ils ont combiné des données provenant d'autres études plus anciennes avec des valeurs parfois très obsolètes issues de petits laboratoires de batteries. Et c'est précisément là que réside le problème.

En raison du caractère obsolète des données, l'étude fut immédiatement critiquée par des sources scientifiques. Cela n'a toutefois pas empêché les sources susmentionnées, ainsi que d'autres opposants aux véhicules électriques, de continuer à s'appuyer sur ces données trompeuses. En 2019, les auteurs de l'Étude Suédoise originale ont riposté à la critique avec une version actualisée et ont réduit leur estimation de CO2 de plus de la moitié.

Une comparaison pertinente du CO2 n'est possible que si tous les facteurs sont pris en compte

Toute statistique ne vaut que par les données sur lesquelles elle se fonde. Pour mesurer l'empreinte carbone de manière significative, il convient de prendre en compte le plus grand nombre possible de facteurs déterminants. Lors de l'évaluation de son expérience, une équipe de recherche renommée de l'université technologique d'Eindhoven a donc analysé le plus grand nombre possible de facteurs déterminants et est parvenue à une conclusion définitive. Après le début de l'expérience en 2020, deux voitures d’essai, une voiture diesel et un véhicule électrique, parcourront chacune 180 000 kilomètres sur une durée de vie de 12 ans. Une voiture est généralement un peu plus utilisée au cours des premières années ; à mesure de son vieillissement, le kilométrage annuel diminue. En moyenne, les deux véhicules parcourront 15 000 kilomètres par an. La consommation de carburant de la voiture diesel restera constante pendant sa durée de vie.

En ce qui concerne la recharge en électricité, l'on peut supposer que l'approvisionnement européen continuera à se tourner vers les énergies renouvelables dans les années à venir. Rien que dans l'UE, la quantité d'électricité produite à partir de charbon a déjà diminué de moitié depuis 2015 et ne représentait plus que 13 % en 2020. Des études scientifiques récentes ont également démontré que, même avec la production de batteries en Chine, dont la proportion d'électricité produite à partir de charbon est encore relativement élevée (plus de 50 %), les avantages des véhicules électriques sont suffisamment importants pour améliorer l'empreinte carbone globale.

Étonnamment, l'avantage moyen en termes de CO2 du véhicule électrique sur l'ensemble de son cycle de vie est de 64 %. Les émissions supplémentaires dues à la production des batteries sont déjà amorties après environ 30 000 kilomètres.

Mais pourquoi les conclusions de cette analyse sont-elles si différentes des nombreuses descriptions précédentes ? Un certain nombre d'études allemandes menées ces dernières années ont conduit à l'émergence d'un scepticisme à l'égard de l'e-mobilité en raison des préoccupations environnementales. Des erreurs ont souvent été commises dans la sélection des données d'analyse et la projection future, dans un monde où les émissions de la production d'électricité seraient nettement plus faibles, n'a souvent pas été intégrée.

Les perspectives de demain

L'Agence Internationale de l'Energie prévoit que la proportion mondiale d'électricité produite à partir de sources renouvelables atteindra 30 % cette année, un niveau record. L'énergie éolienne et solaire est sur le point de connaître la plus forte augmentation jamais enregistrée. Cela s'explique également par le fait que ce type de production d'énergie devient plus abordable grâce aux avancées technologiques. De plus, les trois principales zones économiques, l'UE, la Chine et les États-Unis, se sont fixées un objectif de neutralité en matière de CO2.

Selon le scénario futur où la production d'électricité se fera exclusivement à partir d'énergies renouvelables, les émissions de CO2 indiquées dans cette comparaison, imputables à la fabrication des véhicules, à la production de carburant et à la production d'électricité, seront réduites. En revanche, les émissions dues à la combustion de carburant restent largement constantes, car le potentiel de diminution des émissions du moteur à combustion interne, dans sa forme très mature, reste restreint. Par conséquent, nous nous attendons à ce que l'avantage en termes de CO2 des véhicules électriques augmente à l'avenir. Cependant, l’évolution du parc automobile mondial est aussi lente qu'un grand pétrolier.

En effet, chaque véhicule à combustion interne produit actuellement restera en circulation durant au moins une autre décennie, avant de connaître une seconde vie en Afrique ou dans d'autres pays avec des coûts salariaux faibles.

D'un point de vue environnemental, il faudrait commencer dès aujourd'hui à mettre en circulation le plus grand nombre possible de véhicules électriques. Les objectifs fixés par les constructeurs automobiles et les gouvernements se basent souvent exclusivement sur les nouvelles ventes et ne tiennent pas compte du parc automobile réel, qui est un élément déterminant pour les émissions.