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Ne sommes-nous qu’au début d’un repli boursier long et pénible ?
Calendar20 May 2022
Thème: Investir

L’histoire suggère que la baisse actuelle pourrait être longue et sévère.

Par Peter Garnry, Head of Equity Strategy chez Saxo Bank.
Peter garnry
Peter Garnry

Si on en croit les investisseurs qui fondent leurs décisions d’aujourd’hui sur l’expérience des 12 dernières années, le moment est venu d’acheter des actions. Or, les 12 dernières années n’ont hélas aucune valeur dès lors qu’il s’agit de prendre des décisions aujourd’hui. Les deux replis boursiers des années 1970 et celle qui a suivi la bulle internet correspondent davantage à la dynamique actuelle et, sur la base de ces trois périodes baissières, les investisseurs risquent de souffrir davantage et plus longtemps que prévu.

L’actuel repli paraît brutal et est actuellement le 15e plus important depuis 1928. De nombreux stratèges et investisseurs suggèrent d’acheter le creux des valeurs technologiques et de minimiser l’inflation, plutôt que de regarder la réalité en face : le monde a atteint une limite physique en vivant une crise énergétique galopante et une crise alimentaire mondiale qui ne fera qu’empirer.

Nombre d’entre eux affirment que les replis sont de courte durée et que les actions rebondiront rapidement. Or, ce type de raisonnement repose essentiellement sur la structure des replis depuis 2010, laquelle apparaît comme une exception dans l’histoire des marchés financiers. Le repli le plus long depuis 2010 s’est déroulé entre le 22 mai 2015 et le 11 juillet 2016, soit sur 286 séances de bourse. Le repli actuel est le 4e plus important depuis 2010, et le nombre moyen de jours jusqu’au plus bas des 10 % ou plus depuis 2010 (ils sont au nombre de sept) est de 76 jours. De fait, si nous prenons les années postcrise financière comme référence, le moment est venu d’acheter le creux, et le rebond est proche. Malheureusement, les périodes évoquées ne sont pas représentatives.

Un très long voyage vers l’inconnu

L’examen des 30 plus fortes baisses que le S&P 500 a subies depuis 1928 révèle un schéma frappant. Soit le creux de la vague est atteint rapidement, soit la baisse est beaucoup plus longue. Il n’y a pas de moyen terme. La durée totale d’un repli, c’est-à-dire le temps que prend la courbe à toucher une première fois le creux de la vague puis à revenir entièrement à son sommet antérieur, dépend de la profondeur du repli même, mais aussi du temps que met la courbe à atteindre le creux. Au lieu d’accorder naïvement le même poids à tous les échantillons historiques, il convient de surpondérer ceux qui présentent une plus grande pertinence pour le régime actuel.

Nous pensons que la baisse ayant suivi la bulle internet présente des similitudes avec le repli actuel : aujourd’hui comme alors, la valorisation des actions du MSCI World était supérieure à la moyenne. Les deux autres baisses, au début et à la fin des années 1970, présentent des similitudes avec le choc inflationniste, les contraintes d’approvisionnement et la crise des matières premières que nous observons aujourd’hui. Au cours de ces trois périodes, le repli jusqu’au creux a pris entre 360 et 637 jours boursiers (1,5 à 2,5 ans avant d’atteindre le fond) et, et il a fallu au marché entre 820 et 1 898 jours au total, soit environ de 3 à 7,5 ans, pour se rétablir. En d’autres termes, la douloureuse réalité est que nous venons peut-être d’entamer un très long voyage vers l’inconnu et une situation très différente de celle que nous avons connue ces 12 dernières années.

Quelles valeurs peuvent tirer leur épingle du jeu en ces temps troubles ?

La courbe de l’indice VIX, telle que nous l’avons décrite récemment, est encore relativement plate et ne suggère pas de mouvement de panique ou de capitulation à l’égard des actions américaines. Le pire est donc à venir. La meilleure attitude que les investisseurs puissent adopter est de rechercher l’équilibre.

Quelles valeurs peuvent tirer leur épingle du jeu en ces temps troubles ? On pensera à mélanger les actions avec des obligations à court terme, des obligations indexées sur l’inflation, de l’immobilier, puis, au sein des thèmes, à s’exposer aux matières premières, à la logistique, à la défense, à la cybersécurité, aux semiconducteurs, à l’Inde et aux énergies renouvelables. Les investisseurs éviteront en tout cas à fonder leurs décisions sur leur expérience des 12 dernières années.