Navbar logo new
« Les marchés sont coincés par la politique de la Fed »
Calendar07 Jun 2022

Pierre Puybasset et David Kruk (La Financière de l’Echiquier)

Après un mois de mai particulièrement chahuté, les marchés devraient se diriger vers davantage de stabilité durant les prochaines semaines. Les traders vont toutefois continuer à dominer les débats dans un climat où le pessimisme ambiant atteint des niveaux historiquement élevés.

Dans leur webcast mensuel Au Cœur Des Marchés, Pierre Puybasset (Porte-parole de la gestion de La Financière de l’Echiquier) et David Kruk (Responsable du trading desk chez La Financière de l’Echiquier) sont revenus sur les événements du mois de mai, et ont tiré les principales conséquences pour le mois à venir.

Traders

« Il y a eu beaucoup de volatilité, mais les volumes sont restés très faibles, avec une baisse par rapport au mois précédent. Il n’y a pas vraiment matière à bouger pour les gestionnaires de fonds, et il s’agit plus d’un marché de traders que d’un marché d’investisseurs », constate David Kruk . « Le S&P500 a connu sept semaines de baisse entre avril et mai, un événement qui est exceptionnellement rare, cet indice n’ayant jamais enchaîné plus de huit semaines à la baisse ».

David Kruk rappelle qu’il nourrissait le mois dernier quelques inquiétudes sur la santé de l’investisseur retail américain. « Depuis le début du paiement de leurs impôts mi-avril, ils ont eu tendance à quitter le marché, que ce soit pour les actions ou pour des actifs comme les cryptomonnaies. Après avoir soutenu les mouvements haussiers depuis deux ans, ils sont aujourd’hui aux abonnés absents ».

Resserrement

De son côté, la Reserve Fédérale n’a plus envie d’être désormais en retard par rapport aux attentes du marché, et cette approche plus agressive a impacté le sentiment. « Nous attendons aujourd’hui 50 Bipsde hausse tant en juin qu’en juillet, et les marchés craignent que ce resserrement soit beaucoup trop rapide, avec un risque de récession qui est remonté de 28% à 35% en 2023 », constate David Kruk .

Pour Pierre Puybasset, la Réserve Fédérale essaie de gérer les conditions financières, avec une hausse des taux directeurs qui va se diffuser lentement durant les prochains 18 mois. « Elle tient un discours très négatif pour impacter fortement et rapidement le sentiment sur les marchés et décourager tout optimisme ». La conséquence de cette politique est une montée des inquiétudes sur la croissance future des bénéfices pour les entreprises américaines. « Plus les anticipations d’une récession aux Etats-Unis augmentent, plus les investisseurs anticiperons une hausse moins rapide des taux », souligne Pierre Puybasset.

Quant à l’Europe, David Kruk souligne que l’issue de la guerre en Ukraine va rester la principale incertitude. « Si des négociations sont amorcées entre les belligérants, nous pourrions connaitre un rebond de 10% sur les actions européennes car elles permettraient d’atténuer les craintes liées aux prix des matières premières ». Dans l’intervalle, la BCE va continuer à mener la danse, avec une hausse du taux directeur dès juillet.

Piste d’atterrissage

« La piste d’atterrissage est aujourd’hui particulièrement étroite », constate David Kruk , « avec une inflation qu’il faut enrayer, et une économie qu’il ne faut pas asphyxier en remontant trop rapidement les taux. Nous devrions rester sur un marché qui restera très contenu durant les prochains mois, car la Fed ne veut pas que les Bourses s’écroulent, risque sur le consommateur, mais elle ne souhaite pas non plus que les marchés soient trop optimistes, effet richesse et vecteur d’inflation. Il faudra probablement attendre le mois de septembre avant d’y voir un peu plus clair ».

En attendant, David Kruk constate que le pessimisme ambiant reste toujours plus élevé, avec des niveaux de liquidités dans les portefeuilles qui sont au plus haut depuis 2001. « L’excès de pessimisme est un indicateur contrarian. Lorsque le marché atteint des niveaux extrêmes sur ce critère, le potentiel de baisse est limité ».

Facteurs de soutien

Les semaines à venir pourraient toutefois réserver de belles surprises. David Kruk indique ainsi que les investisseurs retail (qui détiennent 39% des actions du S&P500) pourraient faire leur retour durant les prochaines semaines. « Les entreprises ont également pu relancer leurs programmes de rachats d’actions, un facteur qui a permis au marché de retrouver du soutien depuis la mi-mai ».

Pierre Puybasset souligne pour sa part que « les niveaux de valorisation sont retombés sur des niveaux plus normaux, et nous retrouvons aujourd’hui un potentiel de hausse de plus de 50% par rapport à nos objectifs dans nos fonds, ce que nous n’avions plus vu depuis longtemps. La baisse des marchés a gommé une grande partie des excès. Historiquement, le niveau actuel constitue un bon moment pour revenir dans les marchés pour tout investisseur qui investit à moyen et long terme ».

Juin stable

David Kruk estime que le mois de juin va être dicté dans un premier temps par les banques centrales, et ensuite par l’anticipation des résultats du deuxième trimestre. « Dans un premier temps, l’attentisme va rester élevé avec des volumes faibles. On peut s’attendre ensuite à plus de pessimisme en anticipation des résultats. Les marchés ne devraient toutefois pas baisser trop fortement, en raison d’un sentiment pessimiste fort et d’un positionnement réduit.