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Le nationalisme métallique bat son plein
Calendar17 Oct 2025
Thème: Investir
Maison de fonds: Pictet
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Christopher Dembik, Senior Investment Strategy Adviser Pictet Asset Management.


La Chine vient de franchir une nouvelle étape dans sa stratégie d’hégémonie industrielle. Désormais, tout produit contenant plus de 0,1% de terres rares d’origine chinoise devra obtenir le feu vert de Pékin avant d’être exporté. Et cela, même si le produit est fabriqué et livré dans un pays tiers.


Sachant que la Chine raffine près de 90% des terres rares mondiales, elle possède un quasi-monopole de fait sur la chaîne de valeur.


La Chine ne se contente plus de fournir le monde, elle le supervise. Là où les États-Unis ont imposé au reste de la planète l’extraterritorialité de leur droit, la Chine impose aujourd’hui l’extraterritorialité de sa matière première. Et c’est peut-être encore plus puissant.


Contrairement à ce qu’on croit, les terres rares – lithium, gallium, germanium etc. - ne sont pas si rares que cela.


Le défi n'est pas de les trouver, mais de les transformer. Aujourd’hui, la Chine est leader dans ce domaine. Elle produit environ 60% des terres rares mondiales et réalise jusqu'à 90% du raffinage nécessaire à leur utilisation. C’est l’aboutissement d’une stratégie de longue haleine commencée en 1992 et résumée en ces termes par Deng Xiaoping : « Le Moyen-Orient a du pétrole, la Chine a des terres rares ».


Ces métaux sont essentiels à l'IA, aux puces, aux armes et à la fabrication de pointe. Bref, à toute l’industrie du 21ème siècle.


Tous les pays sont très dépendants de la Chine, même les États-Unis s'approvisionnent encore à 70% en Chine.


Confrontés aux velléités de la Chine, ses clients ont trois options : coopérer, s’approvisionner ailleurs, recréer une chaîne de valeur.


Jusqu’aux années 1990 – au moment où l’industrie est devenue « sale » et qu’on a cherché à la délocaliser dans les pays émergents – les grands pays développés étaient souvent présents sur toute la chaîne de production. C’était le cas de la France qui était capable de maîtriser l’intégralité de la chaîne des métaux stratégiques grâce à trois entreprises : CEA (Commissariat à l’Énergie Atomique), Rhône-Poulenc, Solvay . Le CEA développait les procédés d’extraction et de séparation. Rhône-Poulenc transformait ces éléments en aimants, en catalyseurs, en poudres phosphorescentes pour les écrans et l’électronique. Solvay en affinait la pureté, de l’oxyde au métal, jusqu’à fournir les matériaux les plus exigeants pour le nucléaire et l’optique.


Malheureusement, il a fallu plusieurs décennies pour parvenir à ce succès. Difficile à reproduire de nos jours. Restent donc la possibilité de courber l’échine face à la Chine ou de trouver de nouveaux fournisseurs, chose qui n’est pas aisée.


À surveiller


L’impact du shutdown américain est encore perceptible sur les publications économiques. Il va falloir attendre encore un moment avant d’avoir la première estimation de l’inflation américaine en octobre – une source d’information habituellement cruciale pour la Réserve Fédérale américaine (Fed) qui doit se réunir plus tard ce mois-ci. Seule l’inflation pour septembre est prévue cette semaine. C’est trop tard pour que cela exerce une influence sur la direction des taux d’intérêt.


Faute d’avoir beaucoup de statistiques américaines sous la main, les investisseurs pourraient prêter davantage attention à la publication du PMI américain ce vendredi qui est prévue en territoire d’expansion – signe que l’économie est toujours résiliente. Ce n’est pas le cas de la France. Sauf surprise, l’activité dans le secteur manufacturier et les services devrait être en contraction en octobre, comme c’était le cas le mois précédent. C’est directement l’effet de l’instabilité politique.


Enfin, les résultats d’entreprises se poursuivent avec Netflix, Coca Cola (mardi), Tesla, IBM , SAP (mercredi), Intel (jeudi) et Sanofi (vendredi).


Vous ne l’avez pas lu dans la presse


La guerre des matières premières entre les Américains et les Chinois n’entraîne pas nécessairement une hausse des prix. Pour preuve, le lithium dont le raffinage est assuré par Pékin. Son prix est en baisse constante, passant de 70 000 $ à 10 000 $/t en seulement trois ans, malgré la hausse des ventes de véhicules électriques.