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La politique climatique de l'administration Biden va modifier le monde de l’investissement
Calendar11 Mar 2021
Thème: ESG
Maison de fonds: Lazard

Par David Alcaly, Senior Vice President, Research Analyst, Dynamic Portfolio Solutions, et Nikita Singhal, Director, Co-Head of Sustainable Investment and ESG, chez Lazard Asset Management

Avec l'élection de Joe Biden et l’obtention d’une majorité démocrate au Sénat, les préoccupations liées au changement climatique vont gagner en importance dans la politique américaine, mais aussi sur les marchés.

Il est certes peu probable que les propositions climatiques les plus ambitieuses de Joe Biden puissent être votées au cours des deux prochaines années. Pour autant, les démocrates pourraient adopter au moins deux plans allant en ce sens en 2021. L’adoption du plan de relance de 2.000 milliards de dollars voulu par Joe Biden devrait s’accompagner d’un cadre favorable aux enjeux climatiques. Un projet de taxe carbone est également envisagé, bien que le soutien sur cette question soit beaucoup plus faible.

Il faut toutefois s’attendre à ce que les plans adoptés s’avèrent in fine moins ambitieux qu’attendu : leur taille, leur contenu et leur calendrier dépendront des négociations et discussions au Sénat.

Des efforts du secteur privé et des administrations locales

Malgré l'absence d'action directe à l’échelle nationale au cours des quatre dernières années, les gouvernements des différents États, ainsi que le secteur privé, ont pris des mesures pour s’adapter au changement climatique et en limiter l’ampleur. Le nouveau gouvernement fédéral devrait accélérer cet élan dans les années à venir.

Au niveau des États, 23 gouverneurs représentant 50 % de la population américaine et plus de 50 % du PIB américain ont formé l’Alliance pour le climat des États-Unis (US Climate Alliance). Ces États se sont engagés à réduire les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 26 à 28 % par rapport aux niveaux de 2005 d'ici 2025, conformément aux objectifs de l’Accord de Paris. Quinze États se sont également engagés à atteindre un objectif d'énergies renouvelables à 100 %, et beaucoup ont commencé à mettre en œuvre des systèmes de tarification du carbone. Au niveau local, 468 maires américains, dont ceux des 10 plus grandes villes, se sont engagés à respecter les principes de l'Accord de Paris. Dans le secteur privé, plus de 1 500 entreprises présentes dans le monde entier, dont près de 25 % des entreprises du classement Fortune 500, se sont engagées à atteindre zéro émission nette de gaz à effet de serre.

Les progrès technologiques ont également été encourageants, notamment en raison de l'évolution des réglementations européennes, du comportement des consommateurs et du déploiement de nombreuses technologies « propres » : énergies renouvelables, éclairage LED et véhicules électriques notamment. L'étude annuelle Levelized Cost of Energy de Lazard (LCOE) montre que même sans les incitations existantes, telles que la taxe sur les investissements aux États-Unis et les crédits d'impôt à la production, le coût des énergies renouvelables a baissé de manière significative en raison de la diminution du coût du capital, de l'amélioration des technologies et d’une concurrence accrue.

Enfin, les investisseurs et les marchés financiers prennent conscience à la fois de l'inévitabilité du changement climatique et de son risque d'accélération. Les émissions mondiales d'obligations vertes ont grimpé de 49 % pour atteindre un niveau record de 249,5 milliards de dollars en 2020. Les fonds durables ont enregistré une collecte de 46 milliards de dollars au premier trimestre 2020, alors même que les marchés boursiers ont chuté en raison de la pandémie de Covid-19, et que l’industrie des fonds a enregistré une décollecte globale de 356 milliards de dollars sur la même période. À noter qu’au cours de l'année écoulée, certains secteurs tels que les énergies propres ont largement surperformé face à la moyenne du marché.

D’importantes implications pour les investisseurs

Sous l'administration Biden- Harris , les efforts de lutte et d'adaptation face au changement climatique devraient augmenter considérablement. Bien que les projets les plus ambitieux de la campagne électorale seront probablement freinés en raison de la faible majorité démocrate au Congrès, de nombreux changements pourraient être actés par décret présidentiel ou par de nouvelles réglementations. En outre, un changement de ton et un réengagement en faveur d’objectifs de long terme, via une coopération internationale, devraient contribuer à un nouvel élan de la politique américaine, du secteur privé et potentiellement d'autres initiatives vertueuses à l'échelle mondiale. Indépendamment des sujets politiques, le changement climatique concerne de plus en plus d’aspects de notre quotidien.

Le changement climatique, tout comme les réponses politiques apportées à ce problème, présentent à la fois des risques et des opportunités qui se reflètent sur les marchés financiers. Les entreprises communiquent davantage sur leur politique environnementale, les stratégies ESG d’investissement durable connaissent une popularité croissante, les instruments financiers liés au climat (obligations vertes par exemple) se développent, et les secteurs « pure players », tel que celui des énergies propres, bénéficient de bonnes performances. Il nous semble donc que le monde de l’investissement continuera d'évoluer dans cette direction et qu'il deviendra de plus en plus important, pour les investisseurs, d'intégrer les risques et opportunités climatiques dans leurs analyses.