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Perspectives européennes pour le deuxième trimestre : une reprise inégale selon les régions
Calendar20 May 2021
Maison de fonds: Lazard

Par Aaron Barnfather, Managing Director, gérant de portefeuille/analyste chez Lazard Asset Management Limited (Londres)

Dans le courant du deuxième trimestre, l’Europe devrait commencer à enregistrer un fort rebond des taux de croissance économique, bien que partant de très bas, sous l’effet d’une reprise à la fois cyclique et post-COVID-19.

Après être tombée à des niveaux extrêmement faibles, l’inflation dans le monde commence à s’accélérer, et même si l’Europe est à la traîne, elle ne sera pas en reste. Dans le même temps, l’inflation à court terme devrait continuer de peser sur la performance des marchés obligataires à travers le monde.

Aaronbarnfather
Aaron Barnfather
Si l’on compare d’une année sur l’autre, certaines sociétés semblent avoir enregistré un repli excessif en raison de la pandémie. Les sociétés qui semblaient survendues se sont redressées et certains secteurs ont maintenant complètement récupéré. Nous recherchons un meilleur équilibre entre qualité et reprise pour le restant de l’année.

La reprise économique se traduit par des distorsions de marché et nous pensons que les investisseurs se laissent trop facilement tenter par des sociétés de qualité médiocre sur la base de taux de croissance macroéconomiques solides, que ces entreprises aient ou non de bonnes perspectives à long terme. Par exemple, des domaines tels que l’acier et certaines ressources pourraient dépasser à court terme leurs perspectives à long terme.

D’importantes disparités de taux de reprise sont apparues entre les pays et les régions en fonction des mesures prises, des taux de vaccination contre la COVID-19 et des mutations du virus. Les deux pays ayant les meilleurs taux de vaccination, à savoir le Royaume-Uni et les États-Unis, mènent la reprise à la faveur du redémarrage de l’économie américaine et de la sortie du Royaume-Uni de son confinement hivernal. Cela contraste avec la situation en Europe, où le déploiement des vaccins a rencontré des difficultés et où une nouvelle vague d’infections sévit dans plusieurs pays. La reprise économique en cours risque d’en être affaiblie ou ralentie, mais pas stoppée.

La reprise part d’un taux de croissance initial très faible et s’accompagne d’une peur du virus beaucoup moins forte. Néanmoins, la reprise domestique en Europe devrait être inférieure à celle du reste du monde, ce qui pourrait amener les investisseurs, les entreprises, les citoyens et les responsables politiques à s’interroger sur la manière dont l’Europe devrait être gouvernée à l’avenir. Il convient toutefois de rappeler que les bénéfices des entreprises européennes sont fortement impactés par la croissance mondiale, qui s’améliore généralement plus rapidement.

Valorisations des actions

Jusqu’à présent, la faible croissance réelle et nominale au cours de ce cycle économique a justifié des valorisations élevées pour les actions dont la croissance est supérieure à la moyenne. Cela s’est traduit par une forte dispersion des valorisations, et l’écart s’est creusé entre les titres offrant les valorisations les plus élevées et les valeurs les moins chères.

Cette situation résulte de 12 ans de surperformance des valeurs de croissance et des achats massifs basés sur le momentum au cours des deux dernières années, ce qui a conduit à une déconnexion entre les fondamentaux des valeurs fortement valorisées et le reste du marché.

La dernière fois que cela s’est produit était avant l’éclatement de la bulle technologique au tournant du siècle. Nous ne pensons pas nécessairement que la dispersion actuelle des valorisations ait les mêmes implications que durant cette bulle technologique, mais cela pourrait signifier que les titres qui surperformeront cette année et dans les années à venir seront très différents.

L’inflation est devenue un risque et un sujet de discussion car dans le monde entier, les banquiers centraux commencent à réfléchir au moment où ils pourraient devoir prendre des mesures et relever leurs taux d’intérêt. L’un des principaux indicateurs que nous surveillons est le prix de base des intrants, notamment celui du maïs, qui est utilisé dans la plupart des aliments transformés, et celui du minerai de fer, qui ont fortement augmenté au premier trimestre.

Tensions et protectionnisme au sein de l’UE

Le déploiement des vaccins dans l’UE a été pour le moins imparfait, ce qui a suscité beaucoup d’inquiétude et de colère. Les points de presse sur l’approvisionnement en vaccins ont nui à la réputation de l’institution, tant sur la scène mondiale que dans les pays membres. Tout soupçon de « nationalisme vaccinal » de l’UE fait l’effet d’une bombe politique sur la scène internationale et la façon dont se dénouera le litige sur les exportations de vaccins entre le Royaume-Uni et l’UE pourrait avoir d’importantes répercussions sur les entreprises et les marchés.

Si le protectionnisme se concrétisait par une action politique, cela pourrait avoir un impact sur l’endroit où les sociétés pharmaceutiques choisissent de localiser leur propriété intellectuelle internationale. De même, toute restriction officielle imposée sur les exportations de technologie pourrait avoir une incidence sur le secteur manufacturier et sur le lieu où les fabricants décident de s’installer sur le long terme.

Quelle direction pour les voyages

Les questions sur le rythme et la forme de la reprise des voyages internationaux entretiennent un climat d’incertitude pour les secteurs et les entreprises. Même si nous tablons sur une reprise des voyages à terme, la levée des restrictions se fera probablement au coup par coup et pays par pays.

Notre opinion est d’éviter les risques liés aux voyages et au secteur des voyages. Un an de chiffre d’affaires et de bénéfices relativement faibles n’affecte pas nécessairement les valorisations des entreprises à long terme, mais il y aura des risques pour les entreprises présentant des bilans fragiles et des opportunités pour les sociétés dotées de bilans solides. Cela pourrait créer des opportunités dans les segments qui se sont repliés et entraîner une consolidation du secteur.

L’élargissement de la dispersion des rendements et des valorisations que nous prévoyions fin 2020 se concrétisant, le moment est venu d’être sélectif plutôt que de réagir au marché au niveau macroéconomique. Il sera essentiel de se concentrer sur les fondamentaux et la gestion active afin de pouvoir gérer les risques et saisir les opportunités de la reprise cyclique et du rebond post-COVID-19.

Obligations européennes

Le premier trimestre 2021 a été marqué par les inquiétudes concernant l’inflation. Le taux d’inflation de la zone euro, qui s’inscrivait à -0,3 % en décembre, est remonté à 1,3 % en mars. La hausse des anticipations d’inflation a entraîné une correction des obligations, en particulier les obligations à long terme. L’ensemble de la courbe des taux s’est orientée à la hausse.

La hausse des taux est un problème pour toutes les stratégies obligataires, mais plus particulièrement pour le marché obligataire en euro. Avec des taux négatifs et des courbes de taux plates, il n’avait rien pour contrer la hausse des taux et un portage négatif n’offre aucune protection.

Toutefois, pour l’heure, aucun signe de pressions reflationnistes importantes immédiates n’est perceptible dans la zone euro. La BCE a décidé d’accélérer le rythme des achats effectués dans le cadre du programme d’achat d’urgence en cas de pandémie (PEPP) et contribue ainsi à maintenir le coût de financement à un bas niveau.

Nous entrons dans une période où les investisseurs devront surveiller attentivement et gérer activement plusieurs risques émergents, à commencer par l’inflation et la hausse des taux. Les spreads de crédit ayant atteint récemment des plus bas historiques, leur potentiel de resserrement est très limité. En outre, les taux de défaut européens ont augmenté en février et continueront probablement de grimper au cours des prochains mois.