Par Julien-Pierre Nouen, Directeur des études économiques et de la gestion diversifiée chez Lazard Frères Gestion
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Les dernières prévisions voient le PIB du T4 2023 en hausse de 1,0% par rapport au T4 2022, et le T4 2024 en hausse de 1,1% par rapport au T4 2023. Mais les prévisions de taux de chômage voient celui-ci atteindre 4,1% fin 2023 et 4,5% fin 2024, alors qu’il a oscillé entre 3,4% et 3,6% de novembre à avril, avant de monter à 3,7% en mai.
Une loi popularisée sous le nom de « règle de Sahm », du nom de l’économiste qui l’a mise en évidence, considère que lorsque la moyenne sur trois mois du taux de chômage a progressé de plus de 0,5 point par rapport au point bas des douze derniers mois, l’économie américaine est en récession. Cette moyenne ayant atteint 3,5% sur les derniers mois, un taux de chômage à 4,1% au quatrième trimestre 2023 correspondrait donc à une récession.
En réalité, il serait politiquement très compliqué pour la Réserve Fédérale de présenter des prévisions de PIB correspondant à une récession tout en maintenant une politique restrictive. Les estimations de PIB des banques centrales sont plus souvent faites en réaction qu’en anticipation. En 2007-2008, alors que la Fed avait déjà assoupli sa politique monétaire depuis l’été 2007, il a fallu attendre l’automne 2008 pour que les prévisions de PIB soient conformes à une récession.
Dès lors, le paradoxe d’une banque centrale qui projette de nouvelles hausses de taux mais s’abstient s’éclaircit un peu. La Fed doit probablement considérer que la hausse passée des taux va faire basculer l’économie en récession, mais elle veut maintenir la pression et éviter que les marchés n’assouplissent trop les conditions financières. La communication des banques centrales est un art bien subtil…