Par Gilles Moëc, AXA Group Chief Economist and Head of AXA IM Research
L'extrême droite est arrivée largement en tête, et l'alliance de Macron en troisième position, du premier tour des élections françaises, mais le RN a obtenu des résultats inférieurs de 2 à 3 points à ce que certains des derniers sondages suggéraient. Pourtant, les projections de sièges placent toujours le RN près du seuil de la majorité. Ces extrapolations étaient cependant "mortes à l'arrivée" puisque l'alliance de gauche et les centristes retireront du second tour leurs candidats arrivés en troisième position pour tenter d'empêcher le RN de franchir le seuil, même si la portée exacte de ces "retraits mutuels" reste incertaine. Ce qui est en revanche assez clair, c'est que si les macronistes ont perdu tout espoir de s'approcher d'une majorité, une victoire de l'alliance de gauche serait désormais arithmétiquement très difficile compte tenu du nombre substantiel de circonscriptions dans lesquelles ils sont arrivés en troisième position. L'absence de majorité solide pour l'un ou l'autre des principaux blocs reste un résultat très plausible.
Un article paru dans le FT la semaine dernière a relancé l'intérêt pour les conditions dans lesquelles l'instrument de protection de la transmission de la BCE pourrait être déclenché pour aider la France. Selon notre interprétation, le fait que la France - et l'Italie - soient de nouveau sous procédure de déficit excessif ne serait pas nécessairement un obstacle tant que le gouvernement se montre prêt à se conformer aux recommandations du Conseil de l'UE. Cependant, compte tenu des doutes qui existent dans certains pays clés, la BCE devrait s'assurer que l'action est "proportionnée" au risque, ce qui suggère qu'un élargissement des spreads devrait sérieusement affecter l'économie pour que le TPI soit déclenché. Cet outil est là pour atténuer une crise, pas pour l'étouffer dans l'œuf. Quelle que soit la décision du gouvernement français, il ne doit pas compter sur le soutien immédiat de la BCE.
Enfin, si l'on considère l'actualité américaine de la semaine dernière, nous sommes paradoxalement encore plus confiants dans le fait que la Fed réduira ses taux en septembre, dans un contexte de meilleures nouvelles sur l'inflation et de signes supplémentaires d'un léger ralentissement de l'économie, mais aussi plus préoccupés par la possibilité qu'elle ne puisse pas réduire davantage ses taux en 2025 - ce qui aurait des répercussions sur les taux à long terme - alors que la probabilité d'une victoire de Trump et de la mise en œuvre de son programme inflationniste est de plus en plus élevée.