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Les marchés surestiment l’effet Trump
Calendar12 Dec 2024
Thème: Investir
Maison de fonds: ODDO BHF AM
Oddo bhf am


Par Frédéric Lejoint.


Les petites capitalisations américaines devraient profiter de l’élection de Donald Trump à la présidence.


« La grosse différence avec 2016, c’est que Donald Trump a une équipe prête à prendre les commandes du pays », soulignait récemment Laurent Denize (co-CIO chez ODDO BHF) à l’occasion de la présentation de ses perspectives économiques et financières pour 2025. « La problématique c’est qu’être un fidèle du président ne veut pas nécessairement dire qu’on est compétent ». La nouvelle administration va toutefois avoir les coudées franches pour faire passer les baisses d’impôts et imposer des tarifs douaniers aux partenaires commerciaux des Etats-Unis. « Le seul point positif qu’il est possible de voir est la perspective de voir se régler certains conflits ».



Laurent denize oddo bhf rs

Trajectoire économique


Outre la question d’une menace d’un retour de l’inflation, Laurent Denize estime que c’est surtout la trajectoire de l’endettement public qui pourrait inquiéter les marchés, avec un déficit annuel qui pourrait se creuser à 8% du PIB, et un endettement public susceptible d’exploser à plus de 135% d’ici le milieu de la prochaine décennie. « Dans ce contexte, le niveau actuel des taux à dix ans nous semble être un niveau logique par rapport aux informations dont nous disposons ».


Il souligne toutefois que Donald Trump reste également une personne qui apprécie les transactions, et que la mise en place des tarifs sera vraisemblablement négociée, avec un impact sur l’inflation qui pourrait ne pas être aussi important que les craintes du marché. « La Fed va toutefois se donner plus de latitude quant à la vitesse de détente de sa politique monétaire, et les marchés ont déjà largement révisé leurs attentes à ce niveau ».


Impacts à relativiser


Quant à la politique d’expulsion des immigrants en situation irrégulière, il estime que cette mesure sera chère et très difficile à mettre en place à grande échelle, avec un impact final potentiellement assez limité. « Et s’il expulse vraiment 8 millions d’immigrés, le pays va rapidement se retrouver avec un problème de pénurie de main d’œuvre et d’inflation salariale, avec une économie qui pourrait rapidement se rapprocher de la stagflation ». De même, il estime que les attentes quant à l’impact des baisses d’impôts sur les bénéfices des entreprises sont également trop élevées, vu l’optimisation fiscale déjà mise en place par les grands groupes.


« L’impact des droits de douanes sur la croissance européenne doit également être relativisé, la proportion des exportations susceptibles d’être exposées aux hausses de tarifs (spiritueux, voitures, etc…) étant relativement limitée. Au niveau macro-économique, l’impact sera minime. Un facteur positif pour la croissance européenne pourrait être les prochaines élections en Allemagne, qui devraient déboucher sur une nouvelle coalition qui serait plus encline à faire modifier la Constitution pour permettre une relance budgétaire ambitieuse », souligne encore Laurent Denize.


Déceptions


Dans ce contexte, il souligne que la valorisation du marché américain est aujourd’hui particulièrement élevée à plus de 22 fois les bénéfices attendus pour l’année prochaine, des niveaux qui ne laissent place à aucune déception. « Et nous avons aujourd’hui une tendance récente à une matérialisation du ralentissement de l’économie américaine, qui risque d’être accentué par la baisse des dépenses d’investissement causée par l’incertitude quant aux tarifs à venir ».


Laurent Denize souligne qu’il est aujourd’hui davantage optimiste sur le segment des petites et moyennes capitalisations dans l’optique d’une rotation vers des segments valorisés de manière plus attractive. « Nous croyons vraiment à une rotation qui va se mettre en place, lorsque le marché se rendra compte que l’impact des politiques de Trump sur les bénéfices des grandes entreprises n’est pas aussi important qu’anticipé. Les petites capitalisations sont également moins exposées aux taux élevés qu’en 2016, et seront davantage visées par des acquisitions de grands groupes en panne de croissance ».


« Aux Etats-Unis, nous évitons les secteurs réglementés et privilégions ceux qui vont bénéficier des politiques de Donald Trump. Et en Europe, nous faisons l’inverse en privilégiant les valeurs plus domestiques ». Enfin, il souligne le pessimisme extrême sur les marchés émergents, qui restent fortement impactés par la vigueur du dollar. « Nous continuons de penser qu’il va y avoir des points d’entrée attractifs, en particulier si la Chine se décide à stimuler son économie ».


Valorisations boursières


Au niveau du marché obligataire, Laurent Denize souligne qu’il n’y a pas encore de signes d’un redémarrage de l’inflation, avec un scénario d’atterrissage en douceur qui continue d’être privilégié. « Si l’ensemble des mesures de Donald Trump sont mises en place, nous pourrions changer de paradigme, mais je ne pense pas qu’il ira jusqu’au bout de ces mesures ». En attendant, il estime que le crédit est actuellement relativement cher, et qu’il vaut mieux privilégier le portage avec des rendements qui dépassent 4% pour la dette souveraine à 10 ans aux Etats-Unis.


Enfin, il estime que le billet vert dispose encore d’une marge d’appréciation à court terme, avec des flux financiers qui continuent de privilégier les actifs libellés en dollars. A long terme, Laurent Denize estime toutefois que les anticipations sur la hausse du déficit pourraient mettre à mal la devise américaine. « En conclusion, si j’ai un message à retenir, c’est que nous sommes aujourd’hui dans une configuration où les espérances de rendement ont dramatiquement baissé, avec toutefois des valorisations très dispersées au sein de certaines classes d’actifs, ce qui offre des points d’entrée intéressants aux gestionnaires actifs ».