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Dette émergente : les raisons d'être optimiste
Calendar31 Aug 2021
Maison de fonds: M&G Investments

Par Claudia Calich, gérante et responsable de la dette des marchés émergents chez M&G

L'économie mondiale continue de s'améliorer. La menace COVID-19 semble reculer dans les pays où la vaccination est bien avancée, mais il reste encore du chemin dans certains marchés émergents. Serions-nous à un tournant pour la dette émergente ?
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Claudia Calich

Après un fort rebond au second semestre 2020, la performance de la dette émergente a marqué le pas au cours du premier semestre 2021. Les performances de juillet et d'août (arrêtées au 18 août) se sont avérées mitigées pour la classe d’actifs, les actifs en monnaie locale ayant sous-performé en raison d'un affaiblissement généralisé des monnaies des marchés émergents par rapport au dollar américain, tandis que les actifs en monnaie forte ont enregistré un légère performance, aidée par l'aplatissement de la courbe des rendements du Trésor américain.

La croissance économique des marchés émergents a repris et reste très robuste. Les dernières prévisions du Fonds monétaire international (FMI) font état d’une croissance de 6,3% cette année et de 5,2 % en 2022 pour les économies des pays émergents. Les perspectives de croissance sont également plus équilibrées ; les projections de croissance pour l'Asie ont été légèrement revues à la baisse dans les perspectives du FMI de juillet, alors qu'elles étaient très élevées en avril - en grande partie en raison des effets induits par la situation de l'Inde en matière de COVID-19 - et ont été revues à la hausse dans d'autres régions, notamment en Amérique latine.

Ces perspectives semblent être soutenues par les dernières données sur la vaccination qui montrent que les taux de vaccination s'améliorent rapidement dans une grande partie de l'Amérique latine par rapport à certaines régions d'Asie. À mesure que le taux de vaccination augmente et que les pays s'adaptent au virus, nous pensons que les risques de nouveaux chocs de croissance induits par le virus devraient diminuer considérablement.

Amélioration des balances courantes, inflation assez contenue

Les déséquilibres de l'offre et de la demande mondiales pendant la crise du COVID-19 ont eu pour effet d'améliorer les balances des comptes courants de nombreux pays émergents, certains d'entre eux atteignant leurs niveaux le plus élevé depuis de nombreuses années. Des balances courantes plus saines rendent les pays émergents moins dépendants des entrées de capitaux étrangers et moins sensibles à de nouveaux épisodes de volatilité des marchés, ce qui, selon nous, devrait contribuer à soutenir les devises des pays émergents.

Les devises des pays émergents (mesurées par la composante devises de l'indice JP Morgan's GBI EM Global Diversified) sont en baisse de plus de 3% depuis le début de l'année (au 18 août) et nous semblent sous-évaluées. Selon nous, les devises des pays émergents pourraient offrir aux investisseurs des opportunités d'investissement à moyen terme.

Si les premières discussions sur l'assouplissement de la politique monétaire sont clairement en cours aux États-Unis, nous pensons que la Réserve fédérale (Fed) restera accommodante à l'avenir. De nombreuses banques centrales des pays émergents ont relevé leurs taux d'intérêt de manière préventive, avant la Fed.

L'inflation dans les pays émergents s'est accélérée au cours des derniers trimestres avec la réouverture des économies et le rebond des marchés des matières premières. Cependant, nous pensons que l'inflation devrait y rester relativement contenue. Une grande partie de la pression sur les prix que nous avons observée récemment sur les marchés émergents semble être temporaire, en raison de ce que nous pensons être des facteurs transitoires, des goulets d'étranglement de l'offre et des effets de base dans les données. Nous pensons qu'elle devrait s'équilibrer sur le long terme.

En effet, les récentes données sur les prix fournies par JP Morgan indiquent que l'inflation des prix alimentaires a commencé à se stabiliser récemment.

De faibles taux de défaut à prévoir

Malgré le choc subi par l'économie mondiale au cours des 18 derniers mois, les entreprises des pays émergents présentent actuellement des indicateurs de crédit relativement sains. Une analyse récente a montré que l'effet de levier net des entreprises des pays émergents ne s'est que légèrement détérioré au cours de l'année 2020 et reste nettement inférieur à celui des entreprises des marchés développés. Par ailleurs, parmi les entreprises à haut rendement des pays émergents, le ratio de couverture (mesure de la facilité avec laquelle une entreprise peut utiliser ses flux de trésorerie pour payer les intérêts de sa dette en cours) est désormais supérieur à celui de leurs homologues à haut rendement aux États-Unis pour la première fois depuis 2013.

Dans ce contexte, nous prévoyons des taux de défaut relativement faibles (environ 2% à 3%) sur le segment du haut rendement du marché des obligations d'entreprises des pays émergents en 2021. Des perspectives plus saines pour les entreprises des pays émergents devraient séduire les investisseurs inquiets du potentiel de volatilité sur les marchés obligataires des pays émergents et de la sensibilité aux taux d'intérêt.

La dette des pays émergents a connu une très forte reprise en termes d'écarts de crédit, les obligations investment grade (souveraines et d'entreprises) ayant presque retrouvé les niveaux d'avant la pandémie. Cependant, les obligations souveraines investment grade sont aujourd'hui des crédits plus faibles qu'avant la pandémie, étant donné l'augmentation du fardeau de la dette que la plupart des pays ont connu. Selon nous, cette situation ne se reflète plus dans les écarts de rendement des obligations investment grade. Cependant, nous pensons que le marché des obligations souveraines à haut rendement offre toujours des opportunités intéressantes sous réserve de sélectivité.

En juillet, le FMI a approuvé une allocation de droits de tirage spéciaux (DTS) d'une valeur équivalente à 650 milliards de dollars US, dans le but de stimuler les économies touchées par la pandémie. Les pays émergents devraient recevoir 275 milliards de dollars au total. Il s'agit de la plus importante allocation de DTS dans l'histoire du FMI, la dernière ayant eu lieu pendant la crise financière mondiale en 2009. Nous pensons qu'elle donnera un coup de fouet bienvenu aux finances de certains pays, soutenant ainsi les arguments d'investissement pour la dette souveraine des marchés émergents et frontières en particulier.

Un pays age macroéconomique de plus en plus diversifié

Selon nous la croissance économique des pays émergents va continuer à se renforcer, stimulée par l'expansion des programmes de vaccination qui devraient contribuer à améliorer les fondamentaux des émetteurs souverains et des entreprises. Dans le même temps, les écarts de production dans de nombreux pays émergents devraient maintenir l'inflation sous contrôle, et les positions saines des comptes courants devraient atténuer conséquence de la réduction progressive de la dette américaine.

Bien que nous ne minimisons pas la menace du COVID-19 et ses variants, ces éléments nous donnent des raisons d'être optimistes pour la classe d'actifs d’ici la fin de l'année 2021. Cependant, étant donné les différences de rythme de vaccination, nous pourrions voir apparaître un paysage macroéconomique de plus en plus diversifié parmi les marchés émergents. Une approche flexible et active de la classe d'actifs nous semble donc nécessaire.