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Interview du mois : « Le bois pour traverser les intempéries »
Calendar03 Mar 2022
Maison de fonds: Pictet

Butz christoph pictet

Pictet-Timber est une stratégie unique dans le domaine des fonds de placement, avec une thématique qui mélange croissance et value, et un historique de performance très solide qui valide l’idée d’exposer une partie de son portefeuille sur le secteur du bois.

Pictet-Timber affiche une performance annualisée supérieure à 10% durant la dernière décennie. Après avoir engrangé une progression supérieure à 20% durant l’année 2021, la stratégie est en léger retrait depuis le début de la nouvelle année. Nous avons récemment eu l’occasion de poser quelques questions à Christoph Butz, qui gère cette stratégie depuis sa création en 2008.

Est-ce que vous pourriez décrire rapidement votre stratégie ?

Christoph Butz : « Le principal thème de cette stratégie est la propriété et le contrôle des forets, et l’utilisation du bois sur l’ensemble de sa chaîne de valeur, qui va de l’exploitation des forêts jusqu’au produits de consommation comme les emballages en passant ou les produits hygiéniques. La demande de bois à long-terme est soutenue par la croissance économique, avec des moteurs de croissance robustes comme la hausse des standards de vie dans les pays émergents, le vieillissement de la population dans les pays développés ou l’utilisation d’alternatives au plastique dans l’emballage. Nous restons à ce jour le seul fonds de placement géré activement sur cette filière ».

Quels est le profil de durabilité de cette stratégie ?

C.B. : « Notre stratégie a une contribution positive et unique dans la transition climatique. Pictet - Timber est la seule stratégie à ma connaissance à avoir une empreinte carbone négative, les forets ayant la particularité de pouvoir capter et stocker le CO2. Les produits dérivés du bois sont également de plus en plus utilisés pour remplacer les produits dérivés du pétrole. Enfin, la filière du bois présente la particularité d’être durable sur de nombreux aspects, et d’être déjà en grande partie circulaire. Les déchets générés à une étape peuvent généralement être utilisés à un autre endroit de la production, et de nombreux produits finaux sont recyclés une fois arrivés à la fin de leur vie ».

Pourtant, investir sur des groupes forestiers implique d’investir dans des sociétés qui vont détruire la forêt…

C.B. : « Pas du tout. C’est une conception erronée. Certaines forêts (comme l’Amazonie) doivent être protégées en raison de leur haute contribution unique à la biodiversité, et nous n’investirons jamais dans les pays où la législation forestière ne protège pas ces trésors naturels. Toutefois, de nombreuses forêts (notamment en Europe ou en Amérique du Nord) sont gérées depuis des siècles par les hommes, et doivent continuer à l’être car le bois reste la seule matière première renouvelable susceptible de nous faire réduire notre dépendance par rapport aux produits fossiles et pétroliers ».

Est-ce que vous pouvez nous parler des principales positions dans votre portefeuille ?

C.B. : « Notre stratégie est fortement concentrée, avec 40% des encours dans les dix principales positions. Les plus grandes lignes sont des groupes américains comme Weyerhauser, PotlachDeltic ou Rayonier, qui gèrent ensemble près de 15 millions d’acres d’espaces forestiers (soit environ 6 millions d’hectares). Ce trio de sociétés est vraiment le cœur de notre stratégie et pèsent plus de 15% du portefeuille. La dernière position à plus de 5% est le groupe canadien West Fraser, le plus grand producteur de bois en Amérique du Nord. En Europe, c’est la Scandinavie qui est à l’honneur, avec les conglomérats forestiers Stora (Finlande) ou SCA (Suède), toutes deux très importants propriétaires de forêts ».

Quelle a été la performance du fonds durant l’année écoulée ?

C.B. : « Nous avons assez nettement surperformé en 2021, en dépit de conditions assez volatiles et d’une performance qui est restée en retrait pendant les deuxième et troisième trimestres. Et 2022 est parti pour être également mouvementé, même si la perspective d’une hausse des taux d’intérêts est plutôt de nature à soutenir les cours des valeurs plus cycliques, qui constituent l’essentiel de notre portefeuille. Il faut à ce titre rappeler que Pictet-Timber présente la caractéristique d’être un fonds thématique avec un biais valeur, même si une partie de notre stratégie est investie sur des actions de croissance ».

Est-ce que vous êtes optimiste pour les prochains trimestres ?

C.B. : « Depuis son lancement en 2008, la stratégie a déjà traversé quelques périodes plus mouvementées. Quand les taux augmentent et que le cycle économique s’améliore, la stratégie a tendance à surperformer. A l’inverse, un climat plus récessif a tendance à peser sur la performance de notre stratégie. Pictet – Timber offre également une certaine protection contre l’inflation, car le bois reste un bien de première nécessité. Les entreprises répercutent donc facilement la hausse des coûts vers les clients. En outre, les terrains forestiers sont des actifs réels qui ont historiquement fourni refuge contre la hausse des prix ».

Est-ce que la valorisation est attractive ?

C.B. : « La valorisation de notre fonds se situe plus ou moins en ligne avec sa moyenne de long terme, tandis que le marché global est resté relativement cher en dépit de la récente correction. La décote a donc généralement augmenté, et atteint entre 30 et 40% par rapport au reste du marché. Cette réserve de valorisation constitue également une autre forme de protection contre la hausse des taux ».

Quel est l’impact de la crise actuelle en Russie et en Ukraine sur votre stratégie ?

C.B. : « Notre fonds n’est pas exposé directement à des sociétés russes. L'exposition pondérée à la Russie en termes de revenus pour notre stratégie est de 1,2 %. Avec son récent repli, le marché a déjà escompté bien plus que cela. Bien sûr, la situation reste fluide et imprévisible ».