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Un marché qui se joue des stéréotypes
Calendar18 Jul 2022
Thème: Investir
Maison de fonds: M&G Investments

Ces derniers mois n’ont guère été faciles pour les marchés financiers. Fabiana Fedeli, Directrice des investissements actions et multi-asset et Jim Leaviss, Directeur des investissements Taux chez M&G Investments tentent de repondre à la question: Qu’est-il désormais intégré dans les cours par les marchés et comment les investisseurs doivent-ils se positionner face à la diversité des scénarios possibles ?

Après une période de déni, les intervenants sur les marchés prennent enfin toute la mesure des risques macroéconomiques et géopolitiques à venir : les difficultés rencontrées par les ménages face à la flambée de l’inflation, la persistance (même si la situation s’est légèrement améliorée) de goulets d’étranglement au niveau de l’offre, l’impact de la politique « zéro-Covid » en Chine, la probabilité de pressions supplémentaires sur les prix des matières premières dues à la guerre en Ukraine et les futures conséquences de tous ces facteurs sur les bénéfices des entreprises. À cela s’ajoute le risque d’un resserrement excessif par les banques centrales dans le cadre de l’équilibre délicat qu’il leur faut trouver entre inflation et croissance. Selon les zones géographiques, une récession, à des degrés divers, est désormais considérée comme très probable.

Une profonde récession, prenant sa source en Europe et occasionnée par de nouveaux embargos sur le gaz naturel, entraînerait un risque de repli supplémentaire, en particulier sur les marchés actions.

“Une dépression ou un effondrement des marchés du crédit à l’identique de 2008, une situation où les entreprises et les ménages ont du mal à rembourser leurs dettes, n’est pas anticipé(e) et ne constitue pas notre scénario central. En dépit de la sévérité des chutes accusées sur les marchés obligataires et actions au cours du trimestre, il reste difficile de donner à penser qu’elles représentent une réaction excessive de la part des investisseurs”, dit Fabiana Fedeli, Directrice des investissements actions et multi-asset. “Les fluctuations semblent plutôt être l’expression raisonnable des risques à venir, d’autant plus que les baisses ont commencé à partir de niveaux de valorisation qui, dans de nombreux cas, apparaissaient peu justifiés”.

Des niveaux de trésorerie élevés

En matière de comparaison entre les actions et les obligations, la ligne de démarcation entre une corrélation positive ou inverse entre les deux classes d’actifs va dépendre de ce qui, de la croissance ou de l’inflation, figure au tout au premier plan dans l’esprit des investisseurs obligataires. Du point de vue des valorisations relatives, si l’on compare les rendements, les actions apparaissent encore manifestement bon marché par rapport aux obligations. Fabiana Fedeli : “Toutefois, beaucoup va dépendre des futures perspectives de bénéfices. Les résultats des entreprises risquent d’être plus décevants à l’avenir”.

Fedeli : “Nous demeurons prudents et nous sommes convaincus qu’il ne s’agit pas là d’un marché propice à prendre des paris directionnels excessifs. L’idée consiste plutôt à préserver le capital et à attendre de meilleures opportunités. Dans la mesure du possible, les portefeuilles conservent des niveaux de liquidités élevés afin de pouvoir réagir aux opportunités tactiques”.

Dans cet environnement, l’alpha ne peut être que le fruit de la sélection de titres. Fabiana Fedeli : “Nous continuons de privilégier les entreprises jouissant d’un fort pouvoir de fixation des prix et de bilans solides, à même de mieux résister à l’environnement inflationniste et à la hausse des taux. Il est trop tôt pour revenir aux actions conceptuelles, aux promesses de bénéfices futurs et à la consommation de trésorerie.”

“Au sein des actions, nous continuons de privilégier les thèmes à long terme qui vont selon nous perdurer et bénéficier de futurs investissements indépendamment des caprices des perspectives macroéconomiques, à l’instar des infrastructures et de l’écosystème bas carbone.

Pour autant, la correction commence à créer de nouvelles opportunités d’investissement et nous avons tiré avantage de la volatilité du marché pour acheter certaines valeurs qui avaient été sensiblement sanctionnées, en particulier au sein des segments matures du secteur technologique dans les pays développés et émergents”.

D’un point de vue régional, nous avons identifié plusieurs opportunités au Japon. “Il s’agit d’un marché souvent oublié et témoin d’un mouvement de réforme structurel des entreprises qui se traduit par une amélioration de l’efficacité opérationnelle et bilancielle, des surprises positives en termes de bénéfices et des rachats d’actions record” dit Fabiana Fedeli.

Les marchés obligataires commencent à anticiper une possible récession

« En ce début de second semestre de l’année, les marchés obligataires commencent désormais à témoigner de craintes d’une éventuelle récession », déclare Jim Leaviss, CIO Public Fixed Income chez M&G Investments. « Ils anticipent la possibilité que les banques centrales doivent commencer à abaisser leurs taux en 2023, et ce, en réponse aux craintes récessionnistes de plus en plus vives. »

L’Europe fait probablement face au plus grand risque à cet égard compte tenu des incertitudes entourant les approvisionnements en gaz qui pourraient avoir un impact majeur sur la croissance allemande en particulier. « Toutefois, avec des taux d’inflation à deux chiffres en Europe, nous pensons que la BCE va devoir pour l’instant continuer de relever ses taux pour préserver sa crédibilité - elle doit être vue en train d’agir », indique Jim Leaviss. « Ce qui n’est pas clair à ce stade, c’est le niveau d’inflation qui devra être atteint avant que la BCE ne soit prête à recommencer à assouplir sa politique. Dans l’intervalle, nous pourrions assister à d’autres initiatives visant à stimuler la croissance européenne, telles que de nouvelles mesures de relance budgétaire ».

Jim Leaviss s’attend à ce que l’inflation aux États-Unis marque progressivement le pas au cours du second semestre de l’année à la faveur du ralentissement de la croissance qui devrait commencer à atténuer les pressions sur les prix. « D’ici l’année prochaine, je pense que l’inflation américaine devrait repasser sous la barre des 4 %, notamment grâce à des effets de base importants qui vont commencer à devenir plus favorables ».

Au sein du crédit, Jim Leaviss commence à identifier des opportunités intéressantes. « Les rendements des obligations d’entreprises « investment grade » s’établissent à des niveaux plus élevés qu’au plus fort de la crise du Covid-19. Cette fois-ci, la principale différence est que la brusque augmentation des rendements a été provoquée par la hausse du taux sans risque, tandis que les spreads de crédit se sont relativement bien comportés ».

Alors que les marchés du crédit semblent anticiper un ralentissement, mais non une véritable récession, Jim Leaviss pense que le moment est opportun pour accroître le niveau de risque de manière sélective : « Nous privilégions les émetteurs de meilleure qualité, plus défensifs et qui devraient mieux résister en cas de scénario plus récessionniste. Nous mettons l’accent sur des secteurs tels que le secteur américain des services aux collectivités, les entreprises de gestion des déchets et les groupes ferroviaires qui devraient offrir une certaine résistance dans un contexte de ralentissement économique. »Il s’attend à ce que les taux de défaut demeurent peu élevés au sein de la plupart des segments du marché, de nombreuses entreprises ayant déjà saisi l’occasion de refinancer leur dette depuis plusieurs années.

« Toutefois, nous restons prudents à l’égard de certains segments comme celui des titres à haut rendement notés CCC où nous pensons que les défauts pourraient augmenter assez fortement. Il existe également plusieurs secteurs qui, selon nous, pourraient faire face à certaines tensions, comme notamment les distributeurs et les sociétés immobilières européennes ».