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L’agrégation des données est notre plus grand défi
Calendar18 Sep 2023
Thème: Investir
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Après une formation à la SKEMA Business School complétée par une spécialisation en développement durable et des stages dans le domaine de la microfinance, Coline Pavot a commencé sa carrière chez BNP Wealth Management en 2014 avant de rejoindre La Financière de l’Echiquier en 2017, où elle est devenue en 2020 Responsable de la Recherche Investissement Responsable. Nous avons récemment eu l’occasion de nous entretenir avec elle afin qu’elle nous explique les contraintes et les défis de la publication des rapports d’impact, des documents de plus en plus épluchés par les investisseurs (institutionnels ou retail) pour juger du respect des ambitions des fonds en matière de durabilité.


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Coline Pavot, La Financière de l'Echiquier.


Combien de rapports d’impact publiez-vous régulièrement ?


Coline Pavot: « Dans notre gamme, nous proposons quatre fonds à impact, pour lesquels nous publions chaque année des rapports d’impact. Pour nous, cet exercice est très important car la mesure de notre impact fait partie intégrante de ces stratégies et de nos engagements de transparence à l’égard de nos clients. L’objectif est de démontrer les moyens déployés pour atteindre cet impact ainsi que les résultats que nous avons obtenus. L’obligation de moyens et de résultats est intrinsèquement liée à la notion d’investissement à impact ».


Quels sont les fonds concernés par ces efforts de reporting ?


C.P. : « Les encours des quatre fonds impact (notamment Echiquier Climate & Biodiversity Impact Europe ou encore Echiquier Positive Impact Europe) représentent aujourd’hui plus de 550 millions d’euros1. Il s’agit d’un investissement important, notamment par le temps passé dans la sélection de valeurs ou dans l’engagement auprès des entreprises. Les rapports d’impact mêlent des aspects qualitatifs, afin d’expliquer pourquoi nous décidons d’investir dans telle ou telle entreprise, et les moyens que nous déployons ; et des mesures quantitatives afin de mesurer l’impact de notre investissement à échéance régulière ».


Quels sont les principaux défis que vous rencontrez pour préparer ces rapports ?


C.P. : « La difficulté principale que nous rencontrons est de parvenir à agréger ces mesures d’impact au niveau d’un portefeuille diversifié, car peu d’entreprises publient à l’heure actuelle des mesures d’impact concrètes. Et quand elles publient des chiffres, les méthodologies de calcul entre deux entreprises sont parfois assez différentes, ce qui complique fortement notre tâche ».


Comment parvenez-vous à résoudre ce problème ?


C.P. : « Dans la pratique, nous utilisons les données provenant des entreprises de deux manières. D’une part, nous allons par exemple faire des zooms plus précis sur quelques sociétés emblématiques de nos différentes stratégies en utilisant directement les chiffres qu’elles nous transmettent. D’autre part, nous cherchons à agréger ces données à l’échelle des fonds en prenant le plus de précautions possibles par rapport aux différentes méthodologies utilisées. L’introduction de nouvelles règlementations comme la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) devrait permettre d’apporter un peu plus de transparence, mais nous n’y sommes clairement pas encore ».


Comment collectez-vous les données ?


C.P. : « Nous nous basons essentiellement sur la documentation publique fournie par les entreprises, et nous les contactons si nous avons besoin de données supplémentaires, par exemple si une entreprise a cessé de publier une donnée que nous utilisions dans nos rapports. Nous ne leur envoyons pas de long questionnaire car fondamentalement, les entreprises n’aiment pas ce genre d’exercice et c’est loin d’être une assurance sur la qualité de la donnée collectée ».


Est-ce que vous utilisez également des données provenant de fournisseurs externes ?


C.P. : « Oui, notamment pour tout ce qui concerne les données relatives au climat et à la biodiversité. Pour quasiment toutes les entreprises en portefeuilles, il est aujourd’hui possible de trouver des données sur leur empreinte carbone, sur les émissions de CO2 évitées, sur leur alignement avec l’Accord de Paris ou encore leur empreinte sur la biodiversité. Grâce à ces données complémentaires, nous cherchons à fournir à nos clients une image la plus fidèle possible de l’impact que peut avoir leur épargne ».


La qualité des données fournies par les entreprises s’est-elle améliorée ?


C.P. : « Oui. Pour une stratégie comme Echiquier Positive Impact Europe, nous avons observé une nette progression dans la qualité des données fournies. Nous avons fait beaucoup d’engagement avec les entreprises, et leur envoyons chaque année le rapport d’impact finalisé afin qu’elles puissent constater à quoi servent les données que nous leur demandons de rassembler. Cette démarche est souvent bien appréciée de la part des entreprises même si la mesure d’impact représente un coût pour elles ».


C’est également un coût pour vous, je suppose ?


C.P. : « Bien sûr. Nous sommes plusieurs personnes à travailler sur ces rapports une partie de l’année. Et nous sommes également assistés par un cabinet externe afin de bénéficier d’une vue indépendante sur la qualité du reporting et de challenger notre méthodologie afin de pouvoir identifier des axes d’amélioration de notre démarche. Nous commençons à travailler sur ces rapports en novembre pour une publication en juin ».